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Le recyclage avance

Les responsables de Valhor ont bien intégré la sensibilité du problème des pots en plastique et des pistes de travail sont désormais sur la table.

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Selon le délégué général de l’interprofession Valhor, Jean-Marc Vasse, le recyclage des pots en plas­tique « est un sujet majeur pour la filière du végétal ». Car s’il souligne que « c’est une matière formidable », il rap­pelle – comme tout le monde l’a bien compris aujourd’hui – qu’avec ce matériau « il va falloir s’y prendre autrement ». Il sera en effet difficile, pour une fi­lière qui veut que le végétal soit essentiel aux yeux des Français ou participe à rendre les villes de demain plus vivables, de générer des kilos de déchets de plastique non recyclés­ !

« Nous vendons de l’émotion, de la nature en ville, des solutions végétales afin de lutter contre les dérèglements climatiques. Nous ne pouvons nous permettre de ne pas agir en responsabilité vis-à-vis de l’en­vironnement en poursuivant l’utilisation des pots en plastique sans se soucier de leur filière de recyclage », complète-t-il.

Si la tâche peut paraître simple à mettre en œuvre pourvu que l’on se soit décidé à s’emparer du dossier, ce qui est le cas pour Valhor, nombreuses sont les contraintes techniques et réglementaires qui se dressent sur la route de l’écoconception et du recyclage des pots.

Le contenant horticole présente un faible rapport poids/volume. La logistique à engager pour le transporter est importante et donc coûteuse au regard de la masse collectée. Côté réglementaire, un pot récupéré par un producteur ne relèvera pas du même statut et ne déclenchera pas le même paiement d’écocontributions que son homologue qui va terminer chez le particulier. Même si, fréquemment il peut être fait de la même matière, par le même fabricant, voire être un produit strictement identique !

« Du point de vue de la législation, ce qui détermine le statut d’un pot est de savoir s’il s’agit ou non d’un emballage. Un contenant qui va accompagner une plante toute sa vie, ce qui est généralement le cas pour une plante verte dans la maison, n’est pas un emballage. Le même pot qui ne dure pas toute la vie du végétal­ car celui-ci est planté dans le jardin ou rempoté, est un emballage qui va relever du cycle de tri des ordures ménagères… Ce n’est pas simple de s’y retrouver pour le consommateur ! »

Pots professionnels : un stockage jusqu’à 600 kg

En ce qui concerne les contenants professionnels, c’est-à-dire pour les plantes en pot qui sont vendues à des distributeurs, à des entreprises du paysage ou entre producteurs, Valhor s’est tournée vers A.D.I.Valor, éco-or­ganisme qui a vingt ans d’expérience dans la collecte et le recyclage­ des emballages et des plas­tiques agricoles.

Selon les estimations, ce gisement tournerait autour de 4 800 tonnes par an. L’objectif fixé dans un premier temps par A.D.I.Valor serait de collecter 58 % de ce potentiel d’ici quatre ans et d’en recycler 95 %.

Vincent Regnouf, président d’Enotiko, qui accompagne Valhor dans l’étude de la faisa bilité d’une filière de recyclage du plas­tique, explique que si l’on recycle depuis un certain temps bouteilles et flacons, l’opération s’avère plus compliquée en ce qui concerne les pots horticoles (à l’instar des films ou des barquettes) : les premiers sont plutôt propres, car ils sont le plus souvent jetés vidés, tandis que les pots sont généralement accompagnés de déchets organiques. « Parfois, des pots encore pleins de substrat sont envoyés au recyclage », constate l’expert.

Autre difficulté, les pots noirs contiennent en général du noir de carbone, indétectable par les machines à infrarouges des centres de tri, qui envoient donc ces pots à l’inciné­ration. Enfin, troisième difficulté, il faut savoir si le pot est un emballage ou non, pour savoir de quel circuit et de quel financement il dépend­…

Actuellement, la piste envisagée pour déclencher une collecte dans une entreprise serait que celle-ci stocke ses pots jusqu’à atteindre un poids avoisinant 600 kg, qui semble le plus pertinent en termes de ba­lance entre­ le volume qu’ils représentent pour l’entreprise et le coût de leur transport. Des consignes précises quant au stockage seront délivrées : vider les produits sans les laver­ et les stocker sur palette, en box-palette ou encore dans des sacs transparents de 250 litres qui seront fournis par A.D.I.Valor.

L’objectif pour Valhor est de mettre­ en place une filière nationale, accessible à tous ses adhérents et mu­tualisée. Reste à définir son coût et qui en seront les contributeurs, sachant que la facture devrait s’élever à « quelques centaines d’euros la tonne­ de pots plastique usagés ». L’interprofession doit également se prononcer en faveur d’un test du dispositif en région ou plutôt d’une mise en place au niveau national… qui serait prévue pour les prochains mois, début 2023.

« Avec cette démarche, Valhor anticipe la législation. En 2025, la loi va évoluer. Si la profession ne met rien sur pied, le législateur ne prendra peut-être pas le soin de considérer les spécificités de l’horticulture en matière de recyclage des em­ballages professionnels », indique Morgane Moënne, l’ingénieure qui gère ce dossier chez Valhor.

L’initiative de l’interprofession a été lauréate de l’appel­ à projets « Structuration de filières agricoles et agroalimentaires » du Plan de relance du gouvernement. Les études préalables, la création et l’instauration de cette collecte font donc l’objet d’une aide de l’État.

Pots ménagers : deux pistes possibles

Du côté des pots ménagers, dont le potentiel annuel est estimé entre 16 000 et 17 000 tonnes, Valhor s’est cette fois rapprochée de Citeo, éco-organisme chargé d’organiser la collecte­ et le tri des déchets d’em­ballages ménagers – étapes préli­minaires indispensables avant leur recyclage –, ainsi que de l’AMF, Association des maires de France et des présidents d’intercommunalités, pour faire progresser le dossier.

L’ambition idéale serait que « tous les pots plastique redeviennent des pots plastique », comme l’espère Mikaël Mercier, resté administrateur de Valhor afin de continuer à suivre­ ce sujet. Pas simple puisque, in fine, les déchets postconsommation sont tous mélangés !

À ce jour, après concertation avec ses deux interlocuteurs, Valhor envisage deux pistes. La première serait la collecte des pots horticoles dans les bacs jaunes des particuliers, la seconde la mise en place d’une collecte spécifique.

Des études sont menées afin d’évaluer la faisabilité et le coût de chaque possibilité. Mais Vincent Regnouf rappelle que le chemin menant à un recyclage complet sera long : « Celui­ des flacons existe depuis trente ans, avec un taux actuel de 59 %. En ce qui concerne les pots de yaourt, il aura fallu attendre près de vingt-cinq ans pour être capables de les recycler à grande échelle, alors que ces produits payaient l’écocontribution depuis­ 1992 et que leur potentiel est infiniment plus important que celui des pots horticoles… »

Il faut souligner également que de nombreuses collectivités refusent toujours les pots horticoles dans les bacs jaunes, à cause notamment de la présence de terre polluant les autres­ déchets et de noir de carbone indétectable dans les centres de tri. Il y a donc des difficultés à lever ra­pidement avant de pouvoir donner des consignes de tri claires aux ménages pour la fin de vie des pots horticoles­.

Les choses doivent changer, mais les intérêts divergent !

Mais il y a une certitude partagée par tous les professionnels de la filière : les consommateurs n’accepteront plus à l’avenir que rien ne change. Au fil des échanges avec les entreprises concernées, on voit que certaines choses sont en train de mûrir. Le noir de carbone pourrait disparaître assez rapidement. Plusieurs fabricants de pots ont pris des engagements en ce sens, avec des dates butoirs proches : 2023 ou 2024…

Le financement des filières de collecte et de recyclage des pots en plas­tique professionnels et ménagers par les écocontributions des metteurs sur le marché fait également son chemin.

Reste que, entre producteurs, distributeurs et entreprises du paysage, les intérêts ne convergent pas toujours et que Valhor doit les prendre en considération afin de résoudre maintes équations à plusieurs inconnues. C’est la mission même du travail interprofessionnel : trouver des consensus pour faire avancer les choses. Le sujet du recyclage des pots avance, c’est certain, mais le chemin reste long jusqu’à la solution, tandis que les échéances réglementaires se rapprochent.

Pascal Fayolle

© P. FAYOLLE - Pour le recyclage des pots professionnels, ceux des plantes vendues à des entreprises du paysage ou entre producteurs, il est envisagé de les stocker à hauteur de 600 kg dans les entreprises avant le passage du collecteur. P. FAYOLLE

 

Pour en savoir plus : les autres articles du dossier…

- Les fournisseurs en manque de plastique recyclé
- Plastique horticole : et si une économie circulaire pouvait voir le jour ?
- Dans les réseaux, des initiatives individuelles

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